Le matos

Les instruments ... le monde de la débrouille.

Les bonnes guitares d'origine américaine Fender, Gibson etc.  étaient financièrement inabordables. Le prix d'une Strat Fender, à environ 2 300 F, était alors équivalent à cinq mois de salaire d'un employé, et la Fender Telecaster coutait environ 1 700 F. 
Guitare Eko - Rock du début des années 60 à RennesMoins onéreuses, les guitares électriques européennes du moment étaient surtout les italiennes (Eko, Welson, Davoli), les allemandes Hofner, les suédoises Hagstrom, les hollandaises Egmond et les françaises Royal et Ohio de Jacobacci popularisées par les "yéyé" français. 

Alors pour certains ce sera des guitares fabriquées "maison", des menuiseries sur lesquelles étaient montés des micros et des mécaniques achetés par ailleurs.
Pour la majorité, le choix à Rennes sera surtout guidé par l'offre du magasin Duros, à savoir les italiennes Eko. Fort heureusement, parmi les grattes à coût accessible (environ 600 F), les Eko présentaient un excellent rapport qualité/prix; on les retrouvera d'ailleurs dans beaucoup de groupes français, même professionnels, de l'époque. Il faudra attendre fin 1963 pour voir la première Fender Stratocaster livrée sur Rennes.

Rock du début des années 60Les amplis "made in USA" étaient également très coûteux, un Fender Bandmaster se vendait à 2 800 F (6 mois de salaire d'un employé). 
Les plus fauchés commenceront par cannibaliser des postes de radio à lampes ... parfois les mêmes postes de radios qui leur avait permis d'écouter leurs premiers rock à la fin des années 50, captés sur les grandes ondes crachotantes des stations anglaises.

Rock du début des années 60Sinon, à des coûts accessibles, il était possible de s'orienter au tout début sur de bons amplis de fabrication française: les Garen et les très populaires RV (photo ci-contre). 
Un peu plus tard nous verrons sur Rennes des Echolette (allemand Fender "like"), et en 1964 les premiers Fender puis les Vox AC30 (anglais).

Pour les batteurs c'était plutôt les Gary et surtout les Asba qui constituaient une sorte de standard dans les groupes amateurs au début des années 60, puis vers 1965 on trouvera des Ludwig sur Rennes. 
Enfin, la sonorisation s'appuyait souvent sur les amplis et micros Bouyer au son un peu métallique.


Une formation musicale ... mais pourquoi ?


Rock du début des années 60 à Rennes<  Le paquetage du gratteux du début des années 60.
   La gratte Eko400, le Teppaz "Oscar", la méthode de guitare
   avec ses grilles d'accords et les vinyls à repiquer ... 

Beaucoup des pionniers du rock n'avaient pas reçu de formation musicale préalable, mais peut-être était-ce un avantage ...  trop bien formatés par l'école existante, auraient-ils joué du rock ? la réponse est dans la question. Nous vivions un moment de rupture. Le seul professeur était alors Monsieur Teppaz, et ses cours de vinyle trouvés dans les bacs du disquaire Racine rue La Fayette. 

Méthode de guitare en main, tout se faisait à l'oreille en passant et repassant les titres (parfois en 33 tours lorsque cela allait "trop vite" en 45 tours) et en essayant de poser précisément l’aiguille du tourne-disque sur la plage où se situait le passage à repiquer … les malheureux disques vinyles déjà naturellement grésillants s’en trouvaient prématurément usés sinon rayés ! 

Cette méthode d'apprentissage avait au moins l'avantage d'éduquer l'oreille et de former au repiquage instinctif de riffs.


Les enregistrements de disque à compte d'auteur. 


En ce début des sixties, les groupes amateurs de province, étaient bien éloignés de Paris et des "majors" parisiennes ... pas d'internet, un téléphone fixe coûteux, peu répandu chez les particuliers et qui ne servait qu'à téléphoner. Pour Rennes, pas de 4 voies et une ligne de chemin de fer pas encore électrifiée ... la préhistoire quoi ! Il fallait, selon l'expression consacrée, "monter" à Paris pour avoir une bonne chance d'enregistrer sous le label d'une "major", sinon les groupes des provinces lointaines ne pouvaient guère éditer de disque qu'à compte d'auteur.

Le label DMF, spécialisé dans ce type de services enregistrera ainsi beaucoup d'artistes de province (et pas que des groupes de rock). Il était demandé approximativement 6 mois de salaire d'un employé pour enregistrer et presser 300 vinyles. Pour les jeunes rockers, même en cassant toutes les tirelires, il n'était pas facile de réunir une telle somme sans la participation des parents !
Sur Rennes, seules deux formations pourront dans ces conditions enregistrer chez DMF fin 1964/début 1965: à savoir les Atlas (instrumental style "Shadows") et les Jymys (instrumental non "rock" mais plutôt "jazzy"). Les enregistrements se dérouleront dans les studios de la radio avenue Janvier à Rennes. Avec une gravure en 300 exemplaires inutile de préciser que ces vinyles sont aujourd'hui introuvables.


Les magasins de musique sur Rennes au début des 60's. 


Les magasins commercialisant des instruments de "musique électrifiée" étaient assez peu nombreux, et encore moins ceux offrant l'ensemble des moyens nécessaires aux jeunes rockers. Pour être exhaustif nous citerons:

Duros. 28 bd. de La Liberté.
Rock du début des années 60 à RennesDe loin, Duros était sur Rennes le plus important magasin de musique. Assez généraliste (accordéons, pianos, cuivres ...), il offrait la gamme complète des instruments nécessaires aux jeunes rockers.
On y trouvait notamment les guitares Fender, Gibson, Epiphone, Eko, Davoli, Hofner, Egmond ..., les amplis, Fender, Vox, Garen, RV, Echolette ..., les batteries Gary, Asba, Ludwig ..., les chambres d'écho et de réverbération, les sonorisations, micros etc ... Tous les rockers rennais ont été à un moment ou un autre client de Duros.

Racine. rue Lafayette.
Le métier de Racine était la vente au détail de vinyls, de partitions et de tourne-disques, dont les fameux Teppaz. Tous les amateurs de rock du début des années 60 ont été acheteurs de disques chez Racine. On y trouvait dans les bacs toute la gamme des gouts musicaux, même si a coté de la production "yéyé", les disques de rock authentique se faisaient malheureusement trop rares.
Racine s'ouvrira un moment à la vente d'instruments de musique électrifiée au début des 60's, notamment avec la vente des guitares italiennes Welson. Cette activité rencontrera un succès mitigé et Racine se recentrera rapidement sur son métier d'origine.
Rock du début des années 60 à Rennes
Bossard-Bonnel. 3 rue de la Visitation. 
Bien connu comme facteur d'instruments, Bossard-Bonnel disposait aussi d'un magasin plutôt orienté vers la  musique classique et le jazz : pianos, guitares classiques, cuivres ... mais très peu impliqué dans les instruments électrifiés. On y trouvera toutefois au milieu des années 60 des claviers : orgues, cymbalets ... Les gratteux rennais ne fréquenteront pas beaucoup ce magasin. 

SDO (Jouvin) 19 rue Salomon de Brosse.
la SDO (Sélection Disques de l'Ouest) était un grossiste de la vente de disques sur l'ouest de la France. Il élargira son offre vers le milieu des 60's à la vente d'instrument de musique électrifiée. Il n'y avait pas de magasin proprement dit, où par exemple essayer des instruments, seulement un entrepôt; SDO attirera alors une partie des jeunes rockers rennais déjà initiés et attirés par des prix compétitifs.
 

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